David IV : héros national géorgien

Dans les annales tumultueuses de l’histoire géorgienne, une figure se détache, illuminant les pages sombres de la période médiévale. Ce personnage, c’est David IV, plus connu sous le nom de David le Reconstructeur. Son règne a marqué une ère de transformation et de résilience pour la Géorgie, une épopée qui a changé le cours de l’histoire de cette nation.

L’arrivée au pouvoir de David IV

L’ascension de David IV au trône en 1089 coïncide avec une période tumultueuse pour la Géorgie. Après la défaite de Byzance, le pays se retrouve isolé face à l’empire des Turcs seldjoukides. Pendant près de quinze ans, le territoire géorgien subit une série d’attaques incessantes, désignées sous le nom de « didi turkoba » (grandes calamités turques), exacerbées par des séismes dévastateurs. La population, confrontée à ces assauts répétés, subit une baisse démographique significative.

À l’âge de seize ans, David IV monte sur le trône à la suite de l’abdication de son père, Giorgi II. Bien que jeune, il est loin d’être inexpérimenté. Sous la tutelle de Georges de Tchqondidi et grâce aux liens étroits entretenus avec Byzance, le jeune roi a accès à une éducation remarquable, imprégnée de la théorie stratégique de l’Empire Byzantin.

Des opportunités et des réformes

En 1092, la mort du sultan seldjoukide plonge l’empire dans une guerre civile, offrant ainsi une opportunité à la Géorgie de respirer. Les Croisés, débarquant au Moyen-Orient en 1096 dans le cadre de la Croisade, contribuent également à affaiblir les adversaires de David IV. Profitant de cette situation, le jeune roi entreprend des réformes audacieuses, consolidant ainsi son pouvoir et celui de son royaume. Il en profite également pour ne plus payer de tributs aux seldjoukides

Sur le plan militaire,1118 et 1119 sont des années cruciales. David IV met en place une cavalerie lourde géorgienne, armée jusqu’aux dents d’une armure lamellaire, de lances, d’épées, de haches et de masses. Inspiré par la garde varègue byzantine, il crée la Monaspa, une garde royale composée de guerriers étrangers. Parallèlement, il renforce l’indépendance de la Géorgie vis-à-vis de Byzance. En effet, il rejette le titre de Panhypersebastos (titre byzantin donné aux familles aristocrates proches du pouvoir impérial).  Le roi restreint aussi le pouvoir de l’Église Orthodoxe lors du conseil de Ruisi-Urbnisi, affirmant ainsi l’autorité de la couronne sur le clergé. Dans le même temps, il s’attelle aussi à repeupler certaines zones.

David IV entreprend également des mesures pour centraliser le système d’héritage des terres, réduisant ainsi la corruption et renforçant l’autorité royale. Il n’hésite pas à affronter les familles rivales, comme les Liparides, dont il fait arrêter le leader pour assurer sa domination.

L’alliance avec les Coumans

Conscient de la nécessité de renforcer ses forces militaires, David IV scelle une alliance avec les Coumans. En 1118, il épouse la fille du grand chef couman Otrok, Gurandukht, et les fait baptiser, élargissant ainsi le soutien de son royaume. Invitant même toutes les tribus Coumanes à s’installer en Coumanie Noire, il accroît la puissance de son armée.

Le roi de Géorgie David IV
Représentation de David IV visible au Monastère de Shiomghwime en Géorgie

David IV le conquérant

Le règne de David IV est marqué par une série de campagnes militaires visant à repousser les seldjoukides et à récupérer les territoires perdus. Entre 1105 et 1117, le roi va s’atteler à repousser les seldjoukides tout en récupérant les anciens territoires perdus. David profite de la guerre civile seldjoukide, de la division des royaumes musulmans qui se battent régulièrement entre eux, mais aussi contre les Croisés pour planifier ses campagnes de reconquête. Le souverain étend même son royaume sur les terres actuelles d’Arménie, de l’Azerbaïdjan.

Dans le même temps, la géopolitique régionale change de nouveau. Décédés successivement, les vainqueurs de 1118 sont suivis dans la mort en 1118 par l’empereur byzantin Alexios. De son côté, le souverain musulman Ilghazi attaque en 1119 les Croisés de Roger de Salerne qu’il vainc à la bataille du Champ du Sang.

Désormais enclavée dans le territoire géorgien suite aux conquêtes de David IV qui lui demande désormais un tribut, l’Émirat de Tbilissi appel à l’aide le sultan Ilghazi. Ce dernier répond positivement et lève une armée de plusieurs milliers d’hommes. Les sources divergent, mais la plus crédible est celle du chroniqueur Ali’izz al-Din ibn al-Athîr qui établit l’armée musulmane à 30 000 hommes.

👉🏻Ça peut vous intéresser : L’Oseberg : un bateau sépulture Viking

La bataille de Didgori (1121)

Il faut noter que tout ce qui concerne cette bataille reste assez flous et que certains historiens la considèrent même comme une légende. Face à l’invasion, David IV aurait mobilisé, selon les estimations de l’historien Soso Margishvili entre 15 000 et 18 000 hommes. Afin de compenser leur infériorité numérique, les Géorgiens élaborent un plan audacieux basé sur la ruse. D’après le mythe, 200 cavaliers géorgiens se dirigent vers le camp musulman et annonce vouloir faire défection. Ces derniers les laissent entrer et les cavaliers attaquent en ciblant en priorité les commandants

Déjà mal déployée, l’armée musulmane n’est pas prête lorsque l’armée de David IV arrive. La cavalerie lourde géorgienne finira par donner la victoire à son roi. Les restes de l’armée musulmane seront poursuivis pendant 3 jours et plusieurs milliers d’hommes seront faits prisonniers.

Auréolée de gloire, David IV gagne le surnom d’Aghmashenebeli (le reconstructeur) et la Géorgie deviendra une force régionale de premier plan.

Soldats du Christ ! Si nous combattons avec abnégation, défendant la foi de notre seigneur, ne devrions non seulement surmonter les innombrables serviteurs de Satan, mais le diable lui-même. Je vous conseillerais simplement une chose à ajouter à notre honneur et profit. Levons nos mains vers le paradis et jurons à notre seigneur qu’au nom de notre amour pour lui, nous mourrons sur ce champ de bataille plutôt que de fuir.Discours attribué à David IV lors de la bataille de Didgori

La fin de règne du roi géorgien

Les dernières années du règne de David IV sont marquées par une série d’expansions territoriales, consolidant ainsi la puissance de la Géorgie. Conquérant la ville de Tbilissi en 1122 et la région du Chirvan en 1123, il agrandit encore son royaume en prenant Dmanisi, Ani et la région de Shirvan en 1124. Mais toutes les grandes épopées ont une fin, et David IV s’éteint le 24 janvier 1125 à l’âge de 51 ans, laissant derrière lui un héritage inestimable. Son fils aîné, Démétrius Ier, lui succède, continuant ainsi la lignée des grands souverains géorgiens.

Ainsi, le règne de David IV de Géorgie demeure une époque de légende, où un jeune roi a redéfini le destin de son pays, écrivant son nom en lettres d’or dans les annales de l’histoire.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *