Pocahontas : l’histoire vraie derrière le personnage

Mondialement popularisée par les films Disney, Pocahontas est devenue dans la culture populaire l’une des icônes des peuples amérindiens. Pourtant, la vraie femme est bien loin du costume que lui a taillé la compagnie aux grandes oreilles. Découvrez donc l’histoire réelle de Pocahontas, dissimulée derrière la fable.

La jeunesse de Pocahontas

Fille du chef de la tribu des Powhatans, Pocahontas nait vers 1595. Le territoire de son peuple est alors voisin d’une colonie anglaise nommée Jamestown, sous la coupe de l’entreprise Virginia Company. Les amérindiens changeant souvent de nom au cours de leur vie pour se rapprocher de leur personnalité, la jeune fille s’appelait initialement Matoaka (petite plume de neige). Son père remarquant que sa fille possédait un caractère proche de celui de l’une de ses femmes, il lui donna son nom : Pocahontas (la joueuse).

Arrivés en 1600 sur le territoire des Powhatans, les anglais commencent rapidement à fonder une colonie. En manque de nourritures, les colons s’en prennent aux villages amérindiens pour piller entre-autres de la nourriture. C’est donc dans ce contexte de tension entre son peuple et de nouveaux arrivants que Pocahontas grandit.

La version de John Smith

Capitaine des colons de Jamestown, John Smith est un homme ambitieux. Il passa la fin de sa vie à écrire de nombreux livres mettant en scène ses aventures plus ou moins réelles. Ainsi, ces ouvrages participèrent fortement à la légende de ce personnage. Dans ce cadre, l’écrivain rédige un texte en 1616 relatant sa rencontre avec la jeune Pocahontas.

D’après ce livre, John Smith est capturé en 1607 par des chasseurs Powhatans. Amené devant le chef, l’anglais est condamné à mort. C’est alors que Pocahontas se serait interposée et aurait négociée la vie de l’homme auprès de son père. Par la suite, l’amérindienne et l’européen auraient entretenus une relation amicale ou amoureuse, avant le retour de Smith en Angleterre en 1609 suite à des brûlures.

Pocahontas, le catalyseur de la guerre

Malgré sa diffusion dans la culture populaire (notamment par Disney), de nombreux experts réfutent l’histoire de John Smith. Bien que capturé par les Powhatans, celui-ci aurait eu la vie sauve par le biais de la seule clémence du chef. C’est donc lors de son passage dans le village que l’anglais aurait remarqué que Pocahontas était la fille du leader amérindien.

Malgré cet acte noble, les tensions entre amérindiens et anglais vont continuer à s’envenimer. En effet, les colons auraient mis le feu aux poudres en violant plusieurs femmes amérindiennes. Or, les Powhatans considèrent le viol comme l’un des pires crimes, ce dernier étant puni par la mort. C’est ainsi que débute la guerre.

Face à un surnombre écrasant d’amérindiens par rapport aux colons (le chef Powhatan dirigeait environ 25 000 personnes issues de plusieurs tribus) et du manque de nourriture chronique, John Smith décide d’enlever Pocahontas pour faire pression sur ses ennemis. C’est ainsi que la jeune fille devient l’otage des anglais. Lors d’une visite de sa sœur, celle-ci lui aurait confié avoir été violée à de multiples reprises. De plus, elle serait enceinte de l’un de ses violeurs.

Pocahontas histoire vraie
Portrait de Pocahontas dont les traits ont été blanchis, réalisé après 1616 par un artiste inconnu. Visible à la National Portrait Gallery de Washington DC (Etats-Unis)

La rencontre avec John Rolfe

Les mois passant, les habitants de Jamestown décidèrent de « civiliser » Pocahontas. Effectivement, les colons considéraient les amérindiens comme des sous-Hommes. Selon leur vision des choses, ils devaient donc leur apporter la civilisation.  Pour cela, ils enseignent à l’amérindienne la langue anglaise et l’habille à l’européenne. Celle-ci est également convertie au catholicisme et affublée d’un nouveau prénom : Rebecca.

Une fois « civilisée », Pocahontas entre alors dans les plans de multiples parties prenantes. Il est ainsi décidé que l’amérindienne épousera John Rolfe, un habitant de Jamestown ayant implanté le tabac dans la colonie et développé un juteux business. Le mariage est célébré en 1614 et permet d’apaiser en partie les relations entre anglais et Powhatans.

En coulisse, cette union sert donc les intérêts de nombreux acteurs :

  • Les colons de Jamestown bénéficient d’une paix relative avec les Powhatans.
  • John Rolfe assure la pérennité de sa plantation locale de tabac.
  • La Virginia Company se trouve une égérie toute désignée pour sa colonie.
  • L’Angleterre peut se servir de l’amérindienne pour sa propagande.

L’arrivée en Angleterre

L’union scellée, John Rolfe revient en Angleterre avec sa nouvelle femme et le fils de celle-ci, Thomas (qui serait issu de l’un des viols dont a été victime la jeune femme). Surnommée « Princesse Indienne », Pocahontas déchaîne les passions anglaises et est notamment reçue à la Cour Royale. L’amérindienne multiplie alors les apparitions publiques, sa popularité servant à montrer que La Couronne pouvait « civiliser » les autochtones.

Ne s’adaptant pas à la vie anglaise, Pocahontas tente vainement de convaincre Rolfe de la ramener auprès de son peuple. Finalement, ce dernier cède à ses demandes en 1617. La jeune femme prend place dans un bateau, direction Jamestown et la plantation de tabac de son mari. Cependant, celle-ci tombe malade durant le voyage et meurt de maladie, comme d’innombrables amérindiens de l’époque. Elle est finalement enterrée dans l’église St George à Gravesend, sous une tombe anonyme en dépit de la richesse de son mari.

De son côté, Thomas (le fils de Pocahontas) tombe également malade, mais survit. John Rolfe l’abandonnera. Finalement, c’est son frère, Henry Rofle qui s’occupera du jeune garçon. Choqué par le traitement infligé à l’enfant, Henry lancera des procédures judiciaires à l’encontre de son frère. Ainsi, Thomas hérite de la plantation de son père à la mort de ce dernier. Âgé de 20 ans, il rentre donc à Jamestown, à deux pas du territoire de son peuple. L’Angleterre interdisant désormais les contacts entre colons et amérindiens, il n’entrera toutefois jamais en contact avec sa famille Powhatans.

A voir aussi : La création du monde selon les Amérindiens du Nord

L’héritage de Pocahontas

Morte très jeune (environ 21 ans), Pocahontas a pourtant marqué l’Histoire et la culture populaire. Héroïne malgré-elle du livre de John Smith, son image tirée de l’ouvrage sera largement utilisée par les propagandes anglaises et américaines. Effectivement, ces dernières se serviront d’elle pour justifier le traitement des amérindiens, devant selon eux être « civilisés », afin de les aider à se développer. De nos jours, les films de Disney ont largement contribué à ancrer dans la mémoire collective le mythe erroné de l’amérindienne en se basant sur les versions anglo-saxonnes de sa vie.

Côté amérindien, Pocahontas a longtemps été méprisée. En effet, la jeune femme symbolisait à leurs yeux la déresponsabilisation des colons pour les crimes commis envers leurs peuples. Selon Camille Townsend, spécialiste de l’histoire des amérindiens, la situation semble toutefois changer. Ironiquement, les films Disney basés sur le livre de John Smith réconcilierait les tribus avec Pocahontas. Dépeinte comme une jeune femme belle et forte, les amérindiens se sont finalement intéressés à ce personnage et découvert sa vraie histoire. Près de 400 ans après sa mort, Pocahontas pourrait donc finalement devenir une figure de proue des cultures amérindiennes et non plus un personnage de propagande.

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